Une seule maille est suffisante pour ruiner votre chandail de laine adoré. Par un hasard incroyable, Monsieur a réussi à briser bien exactement une maille sur le coude d’un chandail de laine, ce qui permet de démontrer de façon très concrète que: la force d’une chaîne dépend de son maillon le plus faible. Trêve de proverbes douteux à saveur managériale, si vous avez un chandail de laine à réparer, c’est le projet idéal pour les débutants. Il faut à peu près zéro équipement et vraiment très peu de connaissances en tricot. C’est aussi assez rentable comme réparation, étant donné qu’un bon chandail de laine est assez cher et qu’il vous faudra pour environ 10$ de fournitures.

Notre mission est de renforcer un chandail de laine de façon invisible (à la demande expresse de Monsieur). Comme une seule maille est brisée, pas besoin de s’embarquer dans une grande réparation complexe, on se concentrera sur le renforcement. Je vous conseille d’inspecter le vêtement pour trouver les autres endroits qui ont besoin d’être renforcés. Ils auront en général l’air étrangement élastiques et transparents. L’usure devrait être à peu près symétrique, s’il y a usure d’un côté, il y a fort à parier que l’autre côté est aussi usé. Dans mon cas les aisselles avaient aussi besoin d’un renforcement, mais pour vous ce sera peut-être le bout des manches, le col… Tout le monde est différent!
Est-ce que ça vaut la peine?
Pour illustrer le point de vue financier, j’ai colligé quelques chiffres pour faire cette offre: je vous propose de faire une marche de plusieurs heures avec moi. À tous les pas, vous trouverez 5 sous par terre, que vous pourrez ramasser. Voulez-vous marcher avec moi? C’est un peu le même principe pour ce chandail, quelques sous économisés pour chaque maille réparée. Il a été acheté à 130 euros (environ 165$ canadiens). La laine a coûté 7$. Disons, pour faire un chiffre rond, que j’ai économisé 155$ en y ajoutant 1100 mailles, soit 14 sous pour chaque maille réparée.
Et l’environnement? Mes recherches sur les mouchoirs et le percarbonate de sodium m’ont un peu découragée de chercher des réponses claires à cette question. Je vais quand même tenter d’illustrer l’impact écologique de cette réparation en reconnaissant que c’est très approximatif. Selon différents calculateurs en ligne et les données de cet article, réparer un chandail de laine équivaut à éviter un trajet de plusieurs centaines de kilomètres en voiture à essence. Évidemment, cela dépendra d’où la fibre a été cultivée, puis traitée, puis filée, d’où votre chandail a été tricoté, puis lavé, de la laine sélectionnée pour la réparation, de la voiture que vous conduisez, du nombre de personnes qui s’y trouvent etc, etc. Dans tous les cas, il est évident que d’acheter une balle de laine pour réparer un chandail aura un bien moins grand impact que de tricoter un nouveau chandail, qui requiert 10 voire 20 balles de laine.
Mais le plus important est que ce chandail est le préféré de Monsieur, et qu’il est très, très, très difficile à remplacer. Et donc, la réponse est très simple: oui ça vaut la peine. On se lance.
Faut-il renforcer?
Si on se pose la question… c’est probablement y répondre. Quelques mois avant que cette fameuse maille rompe, j’avais essayé de prendre en photo les coudes « avant » pour illustrer ce blog. Mais les photos avaient l’air parfaites! Je me suis donc dit qu’il n’était pas nécessaire de réparer. Erreur: nous voici quelques mois plus tard et un trou est apparu. Si les mailles semblent un peu relâchées ou que la fibre est amincie (voir les flèches ci-dessous), c’est le moment de renforcer.

Choix de la laine
Trouver une bonne laine est la partie la plus difficile de cette mission. Si votre chandail a été tricoté par quelqu’un spécialement pour vous, demandez-leur s’il leur reste un peu de laine, ce qui vous assurera un match parfait. Parfois, les vêtements neufs viennent aussi avec un petit paquet de laine pour les réparations, c’est toujours utile de le garder pour ce genre de situation. Sinon, préparez votre baluchon (et mettez-y le vêtement à réparer) pour une séance de magasinage en règle à la recherche de la laine qui s’agence en couleur, mais aussi en épaisseur et en texture. Pour ma part je n’ai pas réussi à trouver un match de couleur parfait, mais c’est assez proche.
J’en ai aussi utilisé bien plus que je ne l’aurais pensé (une balle complète de 50g), mais cela dépendra de la grosseur de la laine et de la zone/des zones que vous souhaitez réparer.
Il vous faudra aussi une aiguille à laine ou une aiguille à bille, à choisir en fonction de la laine choisie, laissez-vous guider par la taille.
Technique passe-partout
Délimiter la zone à réparer
La première étape de la technique est de ne pas réparer, de prendre une pause et d’analyser la zone affaiblie et son entourage. Le tricot est une affaire d’alignement: s’il y a des mailles en trop ici et là, le résultat aura l’air brouillon. Dans les photos suivantes, j’ai essayé de dessiner au mieux le raisonnement qui m’a permis de déterminer qu’il ne manquait qu’une maille.



On cherche à renforcer la maille elle-même ainsi que quelques mailles tout autour pour que ce soit bien solide. Pour un résultat propre, le plus simple est de renforcer une rangée de mailles à la fois. Il vaut donc la peine de déterminer la zone à réparer avant de commencer, de façon à progresser rangée par rangée dans une direction déterminée d’avance. Si possible, déterminer cette zone lorsque le propriétaire du vêtement le porte pour s’assurer que la zone choisie a du sens. Dans mon cas, je voulais que le renforcement couvre complètement le coude replié de façon à éviter de futures réparations.
Si on renforce un endroit visible, on voudra peut-être faire un renforcement qui a une forme et une localisation précises (par exemple un rectangle sur le coude au même endroit que sur l’autre coude). Il peut alors être utile de marquer la zone à réparer en plaçant de petit bouts de laine ou corde contrastante à des endroits stratégiques (comme les quatre coins d’un rectangle).

Ajouter la laine
La clé de cet exercice de renforcement est de copier les entremêlements de la laine au mieux. La plupart des tutoriels que j’ai lus proposent une recette: pique en haut, pique en bas, à gauche, à droite. Pour ma part, j’ai trouvé qu’il est plus utile de se laisser guider par le tricot devant moi, surtout quand je renforce des endroits qui ne sont pas des surfaces planes.
Commençons par un cas simple: si on renforce un point jersey (on discutera d’un autre cas plus bas), on se rend compte se la remarquable simplicité d’un tricot: des rangées de boucles entremêlées. En suivant les fibres, on pourra répliquer les petites boucles une à une. On ne fait que suivre le rang sur lequel on travaille, en tentant au mieux de passer entre les mailles et de ne pas piquer dans la fibre. Évidemment, vous risquez de ne pas avoir de beaux rangs de couleurs différentes (comme dans le gif ci-dessous) sur le tricot que vous réparez, il faut donc porter un peu attention pour toujours rester sur le bon rang.

La clé est vraiment de comprendre comment les fibres sont entremêlées. Regardons un deuxième exemple, un peu plus compliqué: un rétrécissement. C’est toujours le même principe, on suit la fibre, mais avec une considération supplémentaire: l’ordre des mailles. Dans le cas du rétrécissement ci-dessous, deux mailles ont été tricotées ensemble et l’une (foncée) est par dessus l’autre (orange). On respecte cet ordre lorsqu’on renforce pour un résultat plus propre.

Ci-dessous, j’ai appliqué cette technique pour renforcer l’aisselle.

On évite de nouer ensemble les différents bouts de fil, on essaiera plutôt de les cacher dans les mailles pour que le vêtement garde son élasticité.
Bloquer le travail
Si vous avez terminé l’étape précédente, vous avez renforcé des centaines de mailles… À cette étape, la réparation peut sembler peu satisfaisante. Vous aurez peut-être remarqué sur les photos ci-dessus que la patch déforme vraiment le vêtement. Oui, ça répare le trou. Est-ce que ça redevient votre chandail préféré? Hmm, pas sûr… Pour résoudre cette situation, on ajoute la touche finale: le blocage. Tout simplement, on mouille abondamment les sections de vêtement réparées avec de l’eau froide ou tiède. On presse pour enlever le surplus d’eau (sans tordre) et on fait sécher à plat. Une fois sèches, les réparations devraient être beaucoup mieux intégrées au vêtement.


Effets secondaires
Outre le fait que je vois maintenant ce chandail à peu près à tous les jours, voici d’autres effets constatés par Monsieur suite à cette réparation:
- Même si l’apparence de la nouvelle et de l’ancienne laine semblait similaire, le contenu en laine est un peu différent et la nouvelle laine se comporte différemment (la définition des mailles est moins nette avec l’usure)
- Le chandail suit moins les mouvements du corps en raison des réparations aux aisselles
- Les prochains endroits à renforcer ont déjà été repérés par Monsieur. Retour au magasin de laine en vue 🙂
Je suis très contente d’avoir trouvé cet excellent blog pour la réparation de chandails de laine. C’est très bien fait!
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Merci beaucoup Isabelle, je suis contente que ça vous ait été utile!
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